Ragnarok (également épelé Ragnarök), signifie deux choses en vieux norrois : Destin ou Dissolution (Rök) des dieux ou des souverains (Ragna). Ce conte mythique de l’époque préviking évoque la fin et de la renaissance du monde. Au fil du temps, la signification de Ragnarok (Ragnarokkr) a changé et, aujourd’hui, le conte se traduit simplement par « Crépuscule des Dieux ».
Le Ragnarök est donc un conte préviking de la mythologie nordique datant du 6e siècle de notre ère. On en retrouve la trace dans des récits du 11e siècle. Ces derniers font part de l’ultime bataille entre les dieux nordiques ; un combat qui met fin au monde. Cette fin, tel qu’elle a été abordée pendant la période de christianisation, est en réalité, plutôt heureuse, car elle coïncide avec la renaissance du monde.
Si l’on en croit les spécialistes, le mythe du Ragnarok serait lié au « voile de poussière de 536 ». Il s’agit d’une catastrophe naturelle survenue en Scandinavie.
Dans les sources scandinaves médiévales, le conte du Ragnarok est résumé dans le manuscrit Gylfaginning (la mystification de Gylfi), la troisième partie de l’Edda de l’historien islandais du 13e siècle, Snorri Sturluson. Dans l’Edda en prose, on trouve également la Völuspa (Prophétie de la voyante) qui daterait très probablement de l’époque préviking.
Pour certains spécialistes, le célèbre poème aurait été écrit deux ou trois siècles avant l’ère viking, c’est-à-dire aux alentours du VIe siècle de notre ère. La copie la plus ancienne qui ait été retrouvée date du XIe siècle ; elle fait usage de vélin (une peau de veau mort-né) comme support.

Le célèbre conte du Ragnarok
C’est avec des chants de coqs que commence le Ragnarök. Ces chants avertissent les neuf mondes des Nordiques. Les trois coqs annonciateurs sont Guillinkambi (« crête d’or »), Fjalar et un autre coq dont le nom n’est pas mentionné.
Guillinkambi réveille les héros d’Odin, tandis que les deux autres alertent Helheim, le monde souterrain scandinave et Jotunheim, le monde des géants. Garm, le grand chien de l’enfer, quant à lui, est toujours attaché à la caverne Gnipahellir, attendant que ses chaînes se brisent.
Trois années durant, le monde n’est que conflits et méchanceté.
S’ensuit une période de mauvais temps, appelée Fimbulvetr (l’effroyable hiver). La neige recouvre les quatre coins du monde et la nature est figée par le gel. Les oiseaux, les ruisseaux, tout s’immobilise et le vent se fait violent et glacial. Le tout est marqué par un ciel gris sombre dans lequel le soleil n’apparaît plus.
Les trois autres hivers qui suivent sont identiques. Entre eux, il n’y aura aucun été et le temps se fait interminable, annonçant les événements à venir.
C’est alors que la guerre prend toute son ampleur et que tout n’est plus que viols et pillages, que le meurtre, le mensonge et la violence deviennent les seules lois.
Alors que le monde est en sang, que les frères se massacrent entre eux, que les fils tuent leurs pères, les cœurs deviennent durs comme pierre. L’envie et la haine sont omniprésentes et les hommes se battent et meurent sur terre. Dans le ciel, les astres, eux aussi, s’éteignent.

Destruction des éléments naturels
Le loup Skol avale le soleil et, avec lui, le feu s’éteint, privant les hommes de lumière et de chaleur. Hati, l’autre loup, dévore la lune, faisant ainsi disparaître la clarté et la beauté. Les hommes sont à l’agonie.
Devant le sol qui se met à trembler, des immenses fossés s’ouvrent, faisant apparaître les entrailles de la Terre. Les montagnes, les rochers, les vallées et les ruisseaux sont engloutis. Le vent arrache et brise les chaînes. Gleipnir est libéré de ses chaînes et le loup Fenrir est libre.
C’est alors que, sous l’agitation de Jormungand, le serpent de Midgard, une immense vague déferle sur le rivage et submerge l’ensemble du paysage. On voit apparaître, dans la mer déchaînée, le navire Naglafar, dont les bords sont constitués des ongles des morts, joints par des clous. À son bord, le géant Hrym règne en maître, domptant les flots.
Sur la terre ferme, le loup Fenrir voit sa gueule de plus en plus béante, alors qu’il erre dans la campagne. Il dévore l’horizon, faisant jaillir le feu de ses naseaux et de ses yeux. Lorsque le serpent Jormungand apparaît à ses côtés, les deux monstres répandent la terreur.
Une gigantesque crevasse s’ouvre dans le ciel et c’est alors qu’apparaissent des cavaliers de feu venus de Muspelheim, le monde des flammes. À leur tête, le géant Surt, qui brandit une épée, menant une cavalcade flamboyante. À son arrivée, le pont Bifrost se brise et tous les symboles de l’Yggdrasil disparaissent.
Le géant Surt arrive sur un champ de bataille nommé Vigrid. C’est là que les vainqueurs et les vaincus se rencontrent, que les vivants, les morts, les disparus et les survivants connaissent leur fin tragique. Arrivent également, sur le lieu du combat final, le loup Fenrir et le serpent Midgard.
Alors que le géant Hrym s’agite, il voit s’avancer vers lui les plus redoutables Thurses de la neige, du givre et de la glace, les géants de la montagne sauvage et les monstres.
Devant leurs adversaires, les fidèles dieux d’Odin se préparent à affronter les fils de Muspelheim.
Levé le premier de tous, Heimal, l’Ase Blanc, pousse un cri qui déchire l’air. Il sonne le cor Gjallarhorn et réveille les dieux pour les préparer au combat. Il périt entre les dents du loup Fenrir qui meurt attaqué par Vidar le Silencieux, fils d’Odin et de Grid, surgit de la sombre forêt. Le serpent Midgard meurt également. Quant à Loki, le dieu malfaisant, il se bat contre le gardien du Bifrost, Heimdal. Une lutte à mort qui marque le conte du Ragnarok, s’achevant sans que quiconque ne survive.

Le renouveau du monde
Si Ragnarök marque la fin des temps dans la mythologie nordique, cette bataille démesurée annonce également le renouveau du monde. En effet, elle donne suite à la vie sur terre qui reprend ses allures de verdure et d’abondance. C’est la naissance d’un nouvel Âge d’Or avec les enfants des dieux qui perpétuent la vie. Balder reprend vie ; Lif (la vie) et Liftrhasir (la persistance) survivent pour former le premier couple humain, repeuplant la terre.
Les historiens et les scientifiques évoquent la possibilité que Ragnarök ait réellement eu lieu, non en tant que bataille, mais en tant que désastre environnemental. Il est, en effet, tout à fait probable que le Fimbulwinter ait été un véritable événement.
Au VIe siècle de notre ère, une éruption volcanique a fait naître un brouillard sec épais et persistant qui a recouvert l’Asie Mineure et l’Europe, éliminant toute notion de saison et d’été pendant de nombreuses années. Le fameux « voile de poussière » qu’a connu la Scandinavie a entraîné la désertion de près de 9 villages sur 10.
Enfin, le renouveau dont il est question dans la mythologie nordique est très vraisemblablement la fin miraculeuse de la catastrophe écologique. C’est notamment la cause écologique qui est évoquée dans la série Ragnarok sur Netflix, un drame intimiste qui rappelle l’urgence qu’il y a à sauver la Terre.
L’événement, le conte et les légendes qui entourent cet événement majeur de la mythologie nordique ont donné naissance à de multiples récits, mais également des réalisations comme des jeux vidéo (God of War Ragnarok) et autres scènes, courts et longs-métrages (Ragnarok série ; Thor : Ragnarok, etc.). Au gré de ces réalisations, la légende se perpétue, prolongeant l’histoire des Vikings à travers le temps et l’espace.