En vieux norrois, le terme berserk fait référence à une peau d’ours, mais également à l’expression « sans protection ». Pour le linguiste et traducteur français, Régis Boyer, ce terme serait lié à un guerrier-fauve viking combattant sans chemise, mais avec une peau d’ours en guise de protection.
Dans la mythologie nordique, les berserkers sont assimilés au dieu Odin. Ils sont non seulement des guerriers, mais également les prêtres des dieux nordiques. Symboles d’une rage incontrôlable et assoiffés de sang, les berserkers étaient ainsi de féroces guerriers vikings qui se seraient battus en état de transe. Que fait-il savoir de ces hommes ?
Les berserkers ont-ils vraiment existé ?
Au début de l’ère viking, vers l’an 800, il existait peu d’institutions militaires en Scandinavie. Certaines se sont développées au fur et à mesure que la société s’est organisée sous la domination d’un seul roi. La toute première institution connue était une confrérie de guerriers agissant pour le compte d’un maître commun. Cet ensemble s’est développé, prenant peu à peu le pouvoir, se constituant comme une élite de nobles au Moyen Âge.
À la même époque, il existait une confrérie de guerriers qui ne trouvait sa place dans aucun ensemble existant. Ces hommes ont survécu dans l’univers des sagas, dans de l’art et du folklore, devenant de véritables démons associés à la guerre et au mal. Derrière le mythe et les ébauches restantes de l’histoire des Vikings, les sources ont révélé l’existence d’hommes ayant prospéré à la frontière entre la vie et la mort, s’alimentant de guerre et se distinguant par leur fureur absolue au combat.
Le Bererker se situe ainsi à la limite entre l’imaginaire et la réalité, à tel point qu’il est difficile de penser aujourd’hui que de telles personnes n’aient jamais existé. Leur pouvoir destructeur était incontestable. En réalité, les berserkers étaient un groupe de guerriers particulièrement habiles et dangereux, associés au dieu Odin.
L’art de la guerre par les berserkers
Si des hommes comme les berserkers, revêtus de peaux de loups, intervenaient en nombre sur les champs de bataille, ils étaient placés à l’avant des troupes, afin de résister au poids d’une attaque ou pour faire face en cas d’attaque.
Les troupes de berserkers se présentaient comme une arme à double tranchant puisque, d’un côté, ils avaient un rôle protecteur et de l’autre, ils étaient difficiles à contrôler dans une bataille, très souvent mal adaptés à la guerre.
Ainsi, les berserkers semblent avoir été plutôt adaptés à des opérations en petits groupes, attaquant de manière indépendante. L’exemple du choix de Saint-Olav (Olav Haraldsson), de placer ses guerriers à l’avant de son armée au cours de la bataille de Stilkestad en 1030, illustre ce propos. En effet, plutôt que de tenir la ligne, les guerriers se mirent en position d’attaque, faisant ainsi chuter le roi.
Quelles sont les caractéristiques des Berserkers ?
Les berserkers étaient principalement associés au dieu Odin, se tournant vers ce dernier pour qu’il leur donne l’agressivité et le courage au combat. Les sources montrent qu’ils sont allés bien plus loin, pouvant mettre en déroute une force nettement supérieure en nombre. Lorsqu’ils attaquaient, ils émettaient des cris de chiens ou de loups enragés. On disait d’eux que rien ne pouvait les arrêter, ni le fer ni aucune arme. Ils ne pouvaient être ni blessés, ni connaître la douleur. En revanche, à l’issue d’une bataille, ils devenaient aussi faibles que les nouveau-nés, épuisés tant sur le plan psychologique que physique.
L’association entre les guerriers berserkers et les peaux de loup est omniprésente à travers les récits. Si bien que le mythe va jusqu’à ne faire aucune distinction entre les deux et certains contextes du mythe semblent associer davantage ces dernières au culte d’Odin, bien plus que les Berserkers y étaient voués.
Sur les traces des redoutables berserkers
À l’origine, les berserkers ont développé leur propre groupe de guerriers professionnels, voyageant et œuvrant au service de différents chefs. Ils se distinguaient notamment par leurs peaux d’ours et de loups qu’ils utilisaient en guise de totem et de couverture.
Tantôt ours, tantôt loup, les guerriers pensaient être dotés de l’esprit de l’animal. On trouve ainsi des exemples de dessins de l’époque sur les plaques de Torslunda (7e siècle), montrant des guerriers revêtus de peaux d’animaux.
Dans les anciennes sagas, la garde du roi, comme celle d’un chef, est présentée comme étant composée de berserkers. Il s’agit d’un groupe de 12 personnes, souvent une troupe d’élite venant s’ajouter à la garde ou à l’armée.
Dans les batailles en pleine mer, on trouvait les vaillants berserkers au niveau de la proue des bateaux, prenant la tête en cas d’attaque. C’est ainsi qu’ils apparaissent, par groupes de 12, dans la bataille de Hafrsfjord, au service de Harald Hårfagre.
On disait des berserkers qu’ils étaient de redoutables ennemis. Assoiffés de sang et de batailles, ils mordaient leurs boucliers, attaquaient les rochers et les arbres, allant jusqu’à s’entre-tuer en attendant que les combats commencent. On trouve, d’ailleurs, un jeu d’échecs du 12e siècle, découvert sur l’île de Lewis (Hébrides), comprenant une pièce présentant un guerrier qui avait mordu son bouclier.
Certains historiens pensent que le titre de berserker était hérité de père en fils. Il existe ainsi des exemples notoires de familles entières de berserkers. La plus connue, dans les sagas, est Egil Skallagrimson. Le père, Skallagrim (« crâne hideux ») et le grand-père, Kveldulv (« loup de nuit ») étaient ainsi tous les deux des berserkers.
Indépendamment de la notion de berserkers, le concept de « berserk » est également apparu, s’appliquant à bien plus qu’un ensemble de guerriers. À titre d’exemple, Harald Hardråde, roi de Norvège (1046 – 1066) a lui-même été « berserker » lors de la bataille de Stamford Bridge dans le Yorkshire en 1066.
L’expression « berserkers » a été également utilisée pour qualifier les guerriers qui ne portaient pas d’uniforme distinctif en peau d’animaux. Un exemple de cela se trouve chez les guerriers d’Olav Haraldsson, et qui ont fait échouer la bataille de Stilestad.
Les premières traces des berserkers dans l’histoire
Il faut remonter dans l’histoire pour trouver les sources écrites les plus anciennes des individus qui pourraient bien être les premiers berserkers. Dans son livre, Germania, l’historien grec Tacticus fait la description de guerriers d’élite hors pair, parmi les tribus allemandes nord européennes.
Au sixième siècle de notre ère, l’historien roumain Prokopios parle d’individus sauvages sans loi (les hérules), venant du Nord, qui se battaient presque nus, uniquement vêtus d’un pagne. Il est dit que cette manière de se montrer était destinée à prouver qu’ils n’avaient pas peur des blessures. Ces guerriers ne portaient ni casque ni cotte de mailles, n’utilisant qu’un simple bouclier pour se protéger.
D’autres personnes répondant à la même description seraient originaires du Danemark actuel, et l’on en retrouve des traces à travers d’autres régions scandinaves, notamment en Norvège.
Il est dit que les hérules, tels qu’ils furent décrits par Prokopios, auraient vécu jusqu’au 6e siècle au Danemark actuel. La plupart d’entre eux auraient été chassés de Scandinavie par les Danois. Ils auraient ensuite servi en tant que guerriers dans l’armée romaine. Ils sont apparus de la même manière que les berserkers, organisés par petits groupes au service de chef ou de roi… Il est donc tout à fait possible que les berserkers trouvent leur origine parmi les mystérieux hérules…
Les berserkers dans les mythes et dans les histoires
Les berserkers ont souvent été mentionnés dans les sagas, les poèmes islandais autrefois composés dans les cours des chefs scandinaves islandais pendant la période viking et au Moyen Âge.
Les sagas décrivent ces individus dans un contexte chrétien, étendant leur mémoire pour recouvrir tout ce qui se distinguait des normes de la société de l’époque. Ainsi, d’une manière plus large, les berserkers étaient aussi bien des guerriers que des voyous, des flibustiers ou encore des pirates. À ce titre, dans le premier recueil de droit islandais, Grågås, il est indiqué qu’un berserker enragé peut être condamné à l’exil.
La source écrite la plus ancienne connue à ce jour sur les berserkers est un poème islandais du 9e siècle, intitulé Haraldskvadet. En se référant à la bataille du Hafrsfjord, l’auteur écrit : « les berserkers rugissaient là où la bataille faisait rage, les loups païens hurlaient les armes de fer tremblaient. »
Dans l’œuvre médiévale Grettis saga, les guerriers sont mentionnés en rapport avec la même bataille : « … des berserkers, que l’on appelait païens ; ils avaient des couvertures de loups… le fer ne les mordait pas ; l’un de… se mit à rugir et à mordre le bord de son bouclier… et grogna violemment ».
Dans le Volsung, saga légendaire d’origine islandaise, les berserkers étaient les gardes d’Odin, se retrouvant « sans armure, aussi fous que des chiens et des loups; ils mordaient leurs boucliers, ils étaient aussi forts que des ours ou des bœufs, ils tuaient tout le monde et ni le feu ni le fer ne les mordaient ».
Il est important de noter que les descriptions des hommes violents et des tueurs à travers les sagas ne doivent pas nécessairement toutes être reliées aux berserkers. En effet, on distingue notamment les « berserkers » des guerriers et des tueurs « normaux », ainsi qu’aux hommes se battant en duel. Dans les textes de la saga nordique, les berserkers ne sont jamais qualifiés de fous ou d’insensés. Ils sont plutôt considérés comme des individus particulièrement agressifs, illustrant un problème social d’ampleur.
Les sagas distinguent ces hommes des autres, en leur attribuant une nature particulière, faisant d’eux des individus méprisables et craints par le plus grand nombre.